« L’idée
était de transformer de simples soldats, marins et aviateurs, en pantins
capables de performances surhumaines. »
Otto
Rank, médecin militaire
La pervitine est un dérivé de la méthamphétamine très connu pour avoir été la « drogue de combat » de l'armée de combat allemande durant la deuxième guerre mondiale. C'est en fait la toute première méthamphétamine à avoir été commercialisée.
On la doit au groupe pharmaceutique allemand Temmler, fondé en 1917 par Hermann Temmler, qui produit de la méthamphétamine sous le nom de Pervitin à partir de 1938.
Tous les niveaux de l’armée avaient le droit à une distribution de Pervitin. Ils étaient plus de 3 millions de soldats. Au total plus de 200 millions de comprimés ont été distribués à la Wehrmacht et à la Luftwaffe entre 1939 et 1945.
Mais au départ, cette drogue n'était pas réservée qu'aux soldats.
En 1939, il était très simple de se procurer cette drogue en Allemagne. On la trouvait sous différentes formes : en poudre, en cachet, et même en chocolat.
Cette substance était considérée comme étant un énergisant, au même titre que le café, le Redbull ou toute autre boisson énergisante comme on en voit dans les commerces aujourd’hui.
"L’armée, l’entourage du Führer, et même parfois la population civile sont friands des drogues de synthèse, dont à l’époque on ne connaît pas les effets secondaires. La Pervitine, très prisée, est considérée comme la drogue du peuple." écrit Tania Crasnianski dans Le pouvoir sur ordonnance.
Deux ans plus tard, en 1941, Leonardo Conti, le chef de la santé du Reich entre 1939 et 1945, estime que la pervitine ne devrait plus être accessible à tout le monde ; elle n'est plus en vente libre. Elle est délivrée seulement sous prescription, et ce sont les soldats qui en profiteront surtout.
Elle permet d'accroître leur vigilance, de réduire leur anxiété et leur appétit. Elle leur permettait notamment de tenir plusieurs jours éveillés.
Elle aurait par exemple permis aux troupes allemandes de ne prendre aucun repos durant toute la durée de la campagne des Balkans au printemps 1941, autrement dit, durant 11 jours. Il est aussi dit que sans cette drogue, les nazis n'auraient peut-être pas gagné le Blitzkrieg contre la Pologne.
Le problème est que, comme toute drogue, elle crée une forte dépendance et à de nombreux effets secondaires.
Ces derniers sont particulièrement graves : vertiges, sueurs, dépression et hallucinations. Dans de nombreux cas, ils auraient même entraînés la mort des soldats : insuffisance cardiaque, morts durant des phases psychotiques...
"Les commandants se plaignaient du fait que les soldats avaient besoin de dormir trois fois plus longtemps lorsque l'effet de la Pervitine se dissipait. Beaucoup d'entre eux devinrent dépressifs. D'autres souffraient de graves psychoses." d'après le site Berliner Kurier.
Certains soldats écrivaient dans les lettres destinées à leur famille l'effet des pilules de pervitine sur eux et témoignaient ainsi de la dépendance que cette drogue créait. Le journal allemand Der Spiegel (crée par Rudolf Augstein juste après la guerre), qui s'appuie sur des lettres de Heinrich Böll, devenu écrivain et prix Nobel de littérature en 1972 écrit :
« Il écrivait régulièrement à sa famille, en évoquant ces "pilules miracles" grâce auxquelles les soldats gardaient le moral. Le 9 novembre 1939, alors que Böll est stationné en Pologne, il écrit à ses parents : "C'est dur ici, et j'espère que vous comprendrez si je ne peux vous écrire qu'une fois tous les deux ou quatre jours dans les temps à venir. Aujourd'hui, je vous écris surtout pour vous demander du Pervitin (...). Je vous embrasse, Hein." » « Dans une lettre envoyée en mai 1940, le jeune soldat Böll explique à ses parents qu'il est devenu "froid", "sans réaction". Dans ses lettres, Heinrich Böll explique qu’une simple pilule de Pervitin était aussi efficace que plusieurs litres de café. Il dit que ce médicament avait le pouvoir de le rendre heureux, au moins pendant quelques heures.
Des témoins de cette époque ont révélé que la consommation de pervitine en Allemagne s'est prolongée bien longtemps après la fin de la guerre, et ce, autant dans la population civile que dans l'armée.
La pervitine est aujourd'hui considérée comme un stupéfiant, et donc une drogue illicite. Mais elle reste très simple à fabriquer. Sa consommation est encore très forte dans certains pays d'Europe et notamment en République Tchèque. D'après une analyse des eaux usées de plus de 42 villes européennes faite en 2014, Prague serait la ville où l'on en consommerait le plus.
Dans le pays entier, près de 31 000 personnes en utiliseraient. C'est un problème majeur que les policiers ont encore beaucoup de mal à gérer seuls, explique
Jindřich Vobořil, le coordinateur national de la lutte anti-drogue :
« La police fait ce qu’elle peut mais ceci n’est pas un problème qui pourrait être résolu uniquement par la police. Ceci doit être considéré comme une épidémie. [...] La pervitine peut être fabriquée dans n’importe quel village, dans n’importe quel appartement, où la production de petites quantités touche de petits groupes de gens. [...] »
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Sources :
Sitographie :
http://www.racontemoilhistoire.com/2016/12/04/pervitine/
https://francais.rt.com/international/6840-pour-vaincre-hitler-a-donne-drogue-soldats
https://www.breizh-info.com/2016/11/18/53289/pervitine-drogue-devastatrice-revient-europe
http://www.clubic.com/mag/sciences/article-811150-2-science-fiction-potion-magique-asterix-vraie-drogue-combat.html
https://www.berliner-kurier.de/news/panorama/wunderpille-pervitin-die-drogenkueche-des-dritten-reiches-22728898-seite2
http://www.radio.cz/fr/rubrique/faits/probleme-recurrent-de-la-pervitine-en-republique-tcheque
http://www.histoire-medecine.fr/seconde-guerre-mondiale-les-soldats-de-la-wehrmacht.php
Bibliographie :
Le pouvoir sur ordonnance, Tania Crasnianski, 18 octobre 2017, Editions Grasset